Paris-Orly, un chantier hors du commun

On ne refait pas tous les jours la piste du deuxième aéroport français. Réalisé à la demande du Groupe ADP, le chantier de rénovation et mise en conformité entamé fin juillet était pourtant devenu indispensable. Construite au lendemain de la seconde guerre mondiale, puis rallongée en 1959, la piste 3 a vieilli malgré les opérations de maintenance régulièrement engagées. Reconstruction d’ailleurs partielle puisqu’un tiers de la piste fait l’objet d’une reprise des enrobés tandis que le reste – les deux-tiers Ouest – est entièrement déconstruit, puis reconstruit. 
Plus important que les travaux réalisés sur la piste 4, ce projet, piloté par l’Ingénierie Groupe ADP, est aussi plus complexe pour différentes raisons. Le chantier se conjugue à un autre chantier en cours de réalisation : le renforcement du pont avion qui surplombe la RN7 et qui passe sous la piste 3.
 

Autre élément non négligeable : dans le cadre du projet Grand Paris Express, un tunnelier est simultanément à l’œuvre pour mener à bien le prolongement de la ligne 14. S’il passe à trente mètres sous terre, il est cependant nécessaire de s’assurer que le creusement du tunnel n’a aucune conséquence en surface. Enfin, le Groupe ADP ne rénove pas uniquement la piste : à la destruction des vieilles dalles de béton aéronautique qui la composent et à la reconstruction proprement dite s’ajoute la mise aux normes des équipements qu’elle accueille. Postes électriques vieillissants, câbles de balisage, suppression de l’amiante dans les réseaux… Au terme du chantier, l’ensemble respectera les normes de l’Agence Européenne de la Sécurité Aérienne (EASA).

Phasage de haute précision, impact limité

Compte tenu de l’importance de l’aéroport de Paris-Orly – un terminal unique composé de quatre zones : Orly 1 – 2 – 3 – 4, trente compagnies aériennes, 33 millions de passagers par an et 627 vols par jour en moyenne – le temps est une donnée essentielle. Véritable tour de force logistique, le chantier confié au groupement d’entreprises comprenant Colas a dû être mené en 14 semaines. Au plus fort des travaux, 650 à 800 personnes ont travaillé sur le site et plus de 150 engins et autres poids lourds furent utilisés : fractionneuses, raboteuses, pelles de démolition, bulls, niveleuses, scraps, finisseurs, alimentateurs etc.
Résultat : un impact limité pour la trentaine de compagnies aériennes présentes puisque à peine 10 % des 55 à 60 000 vols prévus au cours de ces quatorze semaines ont eu à subir des modifications.
 

Économie circulaire, chantier responsable

Défi technique et logistique, le chantier est aussi un challenge environnemental. Dans une logique d’économie circulaire, Colas s’est fixé, avec le Groupe ADP, un objectif ambitieux : recycler sur place l’intégralité des 185 000 mètres carrés de dalles de béton qui composaient l’ancienne piste. Chacune étant épaisse de 40 centimètres, l’ensemble représente tout de même 235 000 tonnes de béton…
Une fois passé au concasseur, le matériau réemployé est appelé à une nouvelle vie. Traité au liant hydraulique, une grosse moitié du béton – 125 000 tonnes – structure la nouvelle piste. 49 000 autres tonnes font l’objet d’un traitement ad hoc qui permet d’élaborer le matériau drainant nécessaires aux tranchées d’assainissement. L’essentiel des volumes restants est réutilisé pour le béton d’enrobage des réseaux multitubulaires, l’excédent étant revalorisé sur d’autres sites.
 

Poussant la logique circulaire jusqu’au bout, les équipes de Colas ont installé trois usines à ciel ouvert sur le périmètre pour traiter les anciennes dalles, évitant ainsi d’interminables convois et limitant l’impact environnemental du chantier. Concrètement, une première centrale de concassage brise les blocs et les transforme en grave à béton de granulométrie variable. La deuxième produit les différents matériaux traités et les bétons utilisés dans le processus de reconstruction tandis que la troisième fabrique l’enrobé destiné à recouvrir la piste au cours de la dernière phase du chantier. Un exemple de responsabilité environnementale : le recyclage de l’ancienne structure permet ainsi d’éviter la circulation de 13 000 semi-remorques, 6 500 pour l’évacuation vers une décharge et 6 500 autres pour acheminer les matériaux dans la zone.
Un défi opérationnel hors du commun : il y a fort à parier que les équipes à l’œuvre sur le site d’Orly s’en souviendront longtemps…